Wernher von Braun victime d’un accident de voiture

hanomag-sturm-02Le lundi 12 mars 1945, onze jours avant son trente-troisième anniversaire,  Wernher von Braun et son chauffeur roulent à destination de Berlin à bord d’une Hanomag Sturm. Il a rendez-vous le lendemain au Service des Armements.

Ils ont quitté les environs de Bleicherode vers 2 heures du matin afin de couvrir la distance, environ 290 km, de nuit, pour éviter les raids des avions de chasse alliés. Ils roulent sur la monotone « autobahn » plongée dans l’obscurité.

Wernher von Braun assis à côté du chauffeur somnole. Bientôt le conducteur s’endort également. La voiture qui roule à environ 100 km/h quitte la chaussée, et finit sa course 12 mètres plus bas dans un talus constitué par le ballast d’une voie de chemin de fer, après avoir dévalé une quarantaine de mètres.

Wernher von Braun se réveille lorsqu’il n’entend plus le bruit des pneus sur la chaussée, il a juste le temps de se protéger la tête avant l’impact.

Il arrive tant bien que mal à ouvrir la porte et s’extirper de la voiture. Il appelle le chauffeur mais ce dernier ne répond pas… Il se dirige alors vers lui et le tire hors de la voiture à bonne distance de l’épave, ce faisant il s’aperçoit que son bras gauche ne répond plus, sa main pend au niveau du genou. Peu à peu il ressent une fulgurante douleur au niveau du bras et le goût du sang dans sa bouche… La dernière chose qu’il distingue avant de perdre conscience sont les flammes orange de la voiture en feu !

Hannes Lührsen l’architecte en chef de Peenemünde et Bernhard Tessmann concepteur en chef des installations et bancs d’essais, qui les suivaient, arrivent sur les lieux peu après, et trouvent les deux hommes inconscients, pendant que Lürhsen veille sur les deux hommes et leur prodigue les premiers secours, Tessmann va chercher de l’aide.

Ce n’est qu’une paire d’heures plus tard qu’une ambulance emmène les deux hommes à l’hôpital de Weissenfels.

Wernher von Braun se réveille avec le torse et le bras gauche dans le plâtre. Son épaule est brisée et son bras cassé en deux endroits. L’entaille dans sa lèvre supérieure a été suturée.

Quant au chauffeur, il a subi un grave traumatisme crânien, mais lui aussi est vivant !

L’accident ne pouvait arriver au pire moment, celui où il faut organiser rien moins que la survie de son équipe et la sauvegarde des précieux documents de Peenemünde, fruits de 13 ans de recherches !

Le mercredi 21 mars, Wernher von Braun insiste pour qu’on lui enlève son plâtre thoraco-brachial, et qu’on lui en confectionne en autre « plus léger », car il faut absolument qu’il sorte de l’hôpital, il reste tant à faire et les jours sont comptés…

Mi-avril, von Braun, sa secrétaire (et petite amie) Hannelore Bannasch, son frère Magnus, et Kurt Lindner se sont réfugiés à Weilheim en Bavière. Son bras le fait atrocement souffrir, il sait qu’il doit ne doit pas tarder à se faire soigner, sinon il risque l’amputation.

Il se trouve qu’un excellent chirurgien orthopédique, spécialiste de la traumatologie du ski alpin, officie à l’hôpital de Sonthofen situé à quelque 70 km au sud-ouest.

Aux alentours du 21 avril, ce dernier va recasser et réduire correctement les fractures, tout cela sans anesthésie, car pénurie oblige, elle est réservée uniquement aux pathologies les plus graves. Wernher von Braun doit rester alité, l’épaule et le bras en contention, avec l’ordre formel de ne pas bouger.

Alors qu’il est cloué sur son lit d’hôpital, une escadrille de P-47 bombarde les environs. Certains patients sont évacués au sous-sol, mais pas von Braun. Heureusement aucune bombe ne touche l’hôpital. Il est également à la merci de groupuscules fanatiques qui peuvent à tout moment le capturer pour s’en service comme otage ou tout simplement l’exécuter afin qu’il ne tombe pas aux mains de l’ennemi.

Lorsque le général Dornberger arrive à Oberjoch et apprend que von Braun est à Sonthofen il envoie immédiatement une ambulance le récupérer.

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La photo de von Braun avec son bras gauche plâtré, maintenu par une orthèse qui permet la mise en abduction de l’épaule (dans une posture qui rappelle vaguement un demi-salut hitlérien, comme le feront remarquer ironiquement certains commentateurs) est la première photo du directeur technique de Peenemünde après sa reddition aux forces américaines, le 2 mai 1945…