Edward Fendell (1932- ) était un contrôleur de vol, INCO (Integrated Communications Officer – modifié en Instrumentation & Communications Officer pour le programme navette spatiale) de l’équipe blanche (Shift 2) d’Eugene Kranz, lors de la mission Apollo 11.
L’INCO était responsable de tous les systèmes de communication (données, voix et vidéo) de la surveillance et de la configuration des systèmes de communication et d’instrumentation en vol. Il surveille également la télémétrie entre le véhicule et le sol, ainsi que les commandes en liaison montante.
Nommé directeur de la section communications en 1969 (d’abord au sein de la Flight Control Operations Branch, puis de la Flight Control Division), Edward Fendell va devenir une célébrité en opérant les caméras couleur à 582 000 dollars (3 700 000 dollars en monnaie constante), véritables bijoux de technologie, de la division Astro-Electronics de la société RCA (GCTA pour Ground Commanded Television Assembly que l’on prononçait « gotcha »).
La presse lui donnera le sobriquet de Captain Video, d’après le premier feuilleton de science-fiction jamais diffusé à la télévision américaine, de 1949 à 1955 : Captain Video and His Video Rangers.
Montées sur les rovers lunaires (LRV pour Lunar Roving Vehicle), lors des missions Apollo 15, 16, et 17, ces caméras peuvent être télécommandées à partir d’une console spéciale comptant 18 boutons (ajoutée au poste INCO de la salle de contrôle des missions), mais seulement lorsque le LRV est à l’arrêt, puisqu’il faut précisément orienter l’antenne haut gain.
Comme le signal met quelque 2 secondes pour être « interprété » et parvenir à la caméra, cela complique un peu les choses pour suivre les astronautes en mouvement… Ce dispositif permet de soulager le travail photographique des astronautes.
Edward Fendell zoome, à la demande des géologues et scientifiques, sur les formations intéressantes, et suit en direct le travail des astronautes.
C’est William E. Perry du E&D (Engineering and Development Directorate) du centre spatial texan, qui a proposé l’idée d’une caméra télécommandée. Edward Fendell avait une doublure, Granvil A. Pennington (1944-2013) surnommé « Al » ou « Gap », INCO également, qui sera le 22e Directeur de Vol de la NASA.
La caméra à proprement parler (CTV pour Color Television Camera) à une masse de 5,8 kg, le tube à technologie SIT (Silicon Intensifier Target) permet de pointer la caméra sur le soleil sans aucun dommage (contrairement à celle d’Apollo 12 équipée d’un tube SEC Secondary Electron Conduction) et surtout, produit des images de qualité bien supérieure à ce qui a été fait précédemment.
Elle est équipée d’un zoom Angénieux de 12,5-75 mm de focale, d’ouverture f2,2-22, le rapport de zoom est de 6:1. La caméra est orientable à distance grâce au TCU (Television Control Unit) d’une masse de 5,9 kg permettant une amplitude de 134° vers la gauche, 214° vers la droite, et de 85° vers le haut et 45° vers le bas, à la vitesse moyenne de 3° par seconde.
Le fait d’arme le plus connu d’ Edward Fendell (et de son assistant, INCO également, Harley W. Weyer avec lequel il a conçu le « script ») est la spectaculaire retransmission du décollage de l’étage de remontée du module lunaire d’Apollo 17.
Pour la mission Apollo 15, la caméra ayant des problèmes de rotation dans le plan vertical, le décollage n’a pu être « suivi ».
Pour Apollo 16 le suivi fut partiel car le Rover était garé trop près du LM, et le mouvement vertical de la caméra pas assez rapide.
En 1973 il recevra une Goldene Kamera (Caméra d’or), qui est une récompense allemande de télévision et de cinéma existant depuis 1965, dans la catégorie meilleure photographie (Best Cinematography).
En ce lundi 21 juillet 1969 au matin, après quelques heures de repos, Edward Fendell, qui n’est pas encore Captain Video, retourne travailler, en chemin il s’arrête au Dutch Kettle pour prendre un rapide petit-déjeuner.
Il s’assoit au comptoir et commande des œufs brouillés. En attendant, il boit tranquillement son café et lit son journal qui rapporte l’événements de la veille. Il n’a pas encore eu le temps de réaliser pleinement la portée des premiers pas de Neil Armstrong et Buzz Aldrin sur la Lune et le fait qu’il y ait activement participé.
Lorsque deux personnes viennent s’asseoir à côté de lui, et entament une conversation :
– « J’ai débarqué en Normandie le jour J, combattu les nazis jusqu’à Berlin, mais je n’ai jamais été aussi fier d’être américain que hier. »
A ces mots, Edward Fendell, submergé par l’émotion, retourne dans sa voiture et fond en larmes…