Lorsque l’astronaute Clayton Anderson retrouve sa combinaison spatiale sur eBay

L’astronaute Clayton Anderson (né le 23 février 1959) a passé 147 jours à bord de la Station Spatiale Internationale (ISS) en 2007, exactement du 10 juin au 4 novembre, lors de l’Expédition 15. C’est la navette Atlantis (Mission STS-117) qui l’y emmène, et c’est Discovery (STS-120) qui le ramène sur Terre.

Les américains ayant annulé leur projet CRV (Crew Return Vehicle), un vaisseau spatial dédié spécifiquement pour l’évacuation des résidents de la Station Spatiale Internationale en cas d’urgence, c’est une capsule Soyouz TMA, continuellement amarrée à la station (par périodes de six mois) qui fait office de chaloupe de sauvetage. En ce moment il y a six personnes à bord de la station, il y donc deux Soyouz amarrés. Pour pouvoir l’utiliser, la NASA a signé un contrat avec Roscosmos, l’agence spatiale russe qui comprend notamment l’entrainement des astronautes, dont des stages de survie propres aux conditions d’atterrissage de la capsule… Et bien évidemment la fourniture d’une combinaison de secours, actuellement la Sokol KV-2,  qui est fabriquée par la société NPP Zvezda, la seule qui permette de voler à bord de Soyouz.

En 2007 un siège sur Soyouz est facturé 21,8 millions de dollars. Puis, avec l’arrêt du programme navette spatiale (dernier vol en juillet 2011) et les retards du Commercial Crew Program qui doit permettre aux américains de se rendre sur l’ISS par leurs propres moyens, via les sociétés privées SpaceX et Boeing, les prix n’ont cessé de flamber, et l’on atteint désormais la somme faramineuse de 81 millions de dollars par vol ! Même en tenant compte de l’inflation, puisque 21,8 millions de dollars en 2007 sont l’équivalent de 26,5 millions en 2018 ! Depuis 2006 la NASA aura versé 3,36 milliards de dollars à la Russie, rien que pour envoyer ses astronautes sur l’ISS et les ramener sur Terre.

Pendant que Clayton Anderson s’entraîne à la Cité des Etoiles, à Moscou, quelqu’un lui propose, moyennant la somme de 10 000 dollars américains, de récupérer sa combinaison après la mission, et de la lui envoyer directement chez lui. Alors peu au fait des us et coutumes russes, il prend cette « offre » pour une boutade…

Clayton Anderson a enfilé sa combinaison Sokol (Faucon en russe) à bord de l’ISS. Derrière lui en haut le russe Oleg Kotov et en-bas à droite le commandant russe de la mission, Fyodor Yurchikhin. Photo NASA.

Des années plus tard, après sa mission dans l’ISS, Anderson apprend que bon nombre de ses collègues ont conservé leurs gants en guise de souvenir. Lorsque les russes apprennent cela, ils exigent, auprès de la NASA, le retour de tous les gants « escamotés »… L’agence spatiale américaine négocie un compromis ; un prêt « temporaire ».  Il faut savoir que ces gants sont fabriqués sur mesure, deux paires de gants sont confectionnés pour chaque combinaison, et ont une date de péremption, ils ne peuvent donc pas resservir. Qui plus est, il ne faut pas oublier que la NASA a payé le prix fort pour cet équipement !

Anderson aimerait bien récupérer ses gants pour les donner au Strategic Air Command and Aerospace Museum, un musée qui se trouve désormais près de la ville où il a grandi, Ashland au Nebraska. Les démarches de la NASA, et les siennes, restent vaines, niet  répondent les russes.

En janvier 2013 il démissionne de la NASA, après y avoir travaillé pendant 30 ans, dont les 15 derniers comme astronaute.

En 2015, alors qu’il a perdu tout espoir, un collègue lui envoie un courriel avec un lien, qui l’emmène sur le site d’enchères américain eBay. Stupéfait, puis dégoûté, il constate que ses gants sont en vente, ce sont bien ses initiales : KA (en alphabet cyrillique Clayton s’écrit avec un K).

Le pseudo du vendeur est Maxim, il vend la paire de gants 4 000 dollars en « achat immédiat ». Après en avoir discuté avec sa femme, de peur de ne pas remporter l’enchère, il décide de les acheter sur le champ. En dépit de ses craintes et réticences la transaction se déroule parfaitement, puisqu’il reçoit son colis quelques jours plus tard ; les gants sont en parfait état. C’est ainsi que ledit musée compta un élément de plus dans son pavillon dédié à l’espace.

Comme le précise le rédacteur indépendant Terry Dunn dans son article publié sur Tested.com intitulé malicieusement From Russia with Gloves : « Après des années de vains efforts, Clay trouva finalement un moyen de récupérer ses gants Sokol pour un musée. Force est de constater une fois de plus que l’argent a été un bien meilleur catalyseur que la diplomatie. »

Clayton Anderson s’interroge alors : « Si ce Maxim a pu avoir mes gants, peut-être qu’il pourra se procurer ma combinaison ? »

Non seulement Maxim a la combinaison, mais également les gants de rechange, les sous-vêtements, les badges, les bottes grises en cuir utilisées lors des déplacements, et même l’étiquette brodée avec son nom… Le prix demandé : 50 000 dollars ! Il se souvient alors, dépité, de la proposition qu’on lui avait faite à la Cité des Etoiles, au Centre d’Entrainement des Cosmonautes Youri Gagarine !

N’ayant pu réunir que la moitié de la somme sur ses propres deniers et l’aide de deux amis, l’achat se fait en deux temps. Avec un premier versement de 20 000 dollars Maxim s’engage à envoyer la combinaison de Russie chez un ami dans le Maryland. Ayant reçu les preuves de l’arrivée du Sokol sur le sol américain, Clayton Anderson continue la levée de fonds. De son côté, le musée organise par le truchement d’une campagne internet un appel à dons, le slogan de cette opération : « Save the Suit ». (Récupérons la combinaison)

En quelques mois la somme nécessaire, soit 73 000 dollars, est collectée,  elle servira pour effectuer le deuxième versement au vendeur, rembourser Clay Anderson et ses amis, et faire l’acquisition d’une vitrine qui permettra de conserver et exposer la combinaison dans les meilleures conditions possibles. La transaction finale se déroule sans anicroche et la combinaison est finalement livrée.

C’est ainsi que le samedi 21 octobre 2017, Clayton Anderson en personne, présente devant un public de plus de 200 personnes, à l’occasion d’une soirée organisée de 17:00 à 20:00, à laquelle quelque 900 personnes assisteront au total, sa chère combinaison Sokol, enfin dans son musée préféré, quelque 10 ans après sa mission dans la Station Spatiale Internationale.

Anderson étant à ce jour le seul astronaute natif du Nebraska, il était normal qu’il tienne absolument à ce que ce soit un musée de ce même état qui accueille sa combinaison Sokol.

Clayton Anderson au Strategic Air Command and Aerospace Museum à côté de sa combinaison Sokol KV-2. Crédit photo : Suzy NELSON – The Ashland Gazette

Une combinaison qu’il n’a porté en définitive qu’une seule fois « en opération », lorsque l’équipage de l’Expédition 15 a dû déplacer le Soyouz TMA-10 vers un autre port d’amarrage pour libérer ce dernier. Dans ce cas précis, le protocole de sécurité prévoit que les trois occupants de l’ISS doivent prendre place dans le Soyouz, car il s’agit d’éviter qu’un astronaute reste seul dans l’ISS au cas où le vaisseau spatial serait dans l’incapacité de s’amarrer à la station. La manœuvre n’a duré que 20 minutes et s’est parfaitement déroulée.

Clayton Anderson dans Soyouz. Photo NASA.

On se demande comment ces articles, qui sont techniquement la propriété de l’état russe, financés par les américains, ont pu se retrouver sur un site d’enchère comme eBay. Ceci dit, tout le monde sait que le spatial russe est gangrené par la corruption, sachant qu’en Russie elle est endémique, le pays se situant à la 131e place sur 176, en 2016, selon Transparency International ! (Le classement se faisant, du moins au plus corrompu. Les Etats-Unis sont à la 18e place et la France à la 23e). Si vous allez sur eBay.com et recherchez des articles « Sokol », la liste est impressionnante !

De la même manière, en 2012 par exemple, la combinaison Sokol de Shannon Lucid (mission sur Mir du 22 mars au 26 septembre 1996) a été vendue aux enchères par la maison Bonhams pour la somme de 28 427 euros… En 2016 celle de Donald Pettit, de l’Expedition 6 (du 25 novembre 2002 au 3 mai 2003), qui a regagné la Terre à bord de Soyouz TMA-1, a été vendue pour la bagatelle de  50 817 euros…

Anecdote dans l’anecdote : Clayton Anderson travaille à la NASA depuis 1983, tout d’abord au sein de la division Mission Planning and Analysis, au Centre Spatial Johnson (…) Il ne devient astronaute qu’en 1998 (Groupe 18) après avoir postulé… 15 fois !

Mes plus chaleureux remerciements à M. Dominique Gaudrier, grand passionné de la conquête de l’espace depuis 1965, et collectionneur émérite, à l’origine de cette anecdote. L’essentiel de cette histoire se trouve ici en anglais. Vous pouvez retrouver les excellentes contributions de « Papy Domi » sur l’excellent Forum de la Conquête Spatiale.

En 1958 Walter Dornberger prévoit un Homme sur la Lune d’ici dix ans

En 1958, environ 3 ans avant que le président Kennedy ne lance la course à la Lune, Walter Dornberger avait prédit qu’un homme marcherait sur la Lune d’ici dix ans : 

« Savoir s’il sera russe ou américain dépendra de combien le Congrès est disposé à dépenser » précisa t-il.

Le général et ingénieur Walter Robert Dornberger (1895-1980) était le responsable du programme de missiles de l’armée allemande, notamment à Peenemünde.

Wernher von Braun travaillait sous ses ordres.

Il émigre aux Etats-Unis en 1947 après avoir passé deux ans dans un camp de prisonniers de guerre au Royaume-Uni, à Island Farm – Camp 198 / Special Camp XI, près de la ville de Bridgend au Pays de Galles.

Il travaille pour l’armée de terre et l’armée de l’air américaine, notamment sur les projets X-15 et le X-20 Dyna Soar. Citoyen américain, il deviendra vice-président et scientifique en chef de la société Bell Aerosystems.

C’est au cours d’un voyage en Allemagne qu’il décède d’une crise cardiaque. Il est mort dans la ville de Sasbach située à 250 km de sa ville de naissance, Giessen.

Lorsqu’en 1984, les américains installent pour la première fois en Europe leur système anti-missiles Patriot, près de Giessen, ils baptisent ce site du nom de ce pionnier des missiles et des fusées.

Neil Armstrong et Sir Edmund Hillary au pôle Nord

Le 1er avril 1985, une équipe de 15 personnes se retrouve à Edmonton, au Canada avec comme objectif, atteindre le pôle Nord géographique. Il y a notamment, Sir Edmund Hillary (1919-2008), le premier Homme à avoir gravi le Mont Everest en 1953 (avec son sherpa Tenzing Norgay), son fils Peter (né en 1954), Steve Fossett (1944-2007) qui réalisera en 2002 la première circumnavigation de la Terre en montgolfière en solitaire sans escale, Patrick Morrow (né en 1952) le premier à accomplir l’ascension des sept sommets de la liste de Reinhold Messner, il a gravi le premier (Mont McKinley) en 1977, et le dernier (Puncak Jaya), le 7 mai 1986, et, Neil Armstrong (1930-2012), le premier Homme à marcher sur la Lune.

Neil Armstrong avait vu le pôle Nord depuis l’espace mais n’y était jamais allé.

L’expédition, qui ne fut pas médiatisée, a duré 11 jours et fut organisée et dirigée par l’explorateur professionnel Michael Chalmer Dunn, il voulait réunir les explorateurs les plus prestigieux de la planète. Mike Dunn qui a notamment effectué le premier saut en parachute au-dessus de pôle Nord en 1981 et qui réalisait là son septième voyage en arctique. Le coût de cette expédition : 10 000 dollars par personne. (23 000 en dollars constants)

C’est donc le samedi 6 avril, 1985, la veille de Pâques, 76 ans jour pour jour après Robert Peary (1856-1920), à très exactement 19:01 (Mountain Standard Time – Heure normale des Rocheuses), soit le dimanche 7 avril à 03:01 (Heure en France – UTC+1), que les explorateurs atteignent leur but.

Ils resteront une heure et demi au pôle Nord.

A peu près le même temps qu’il leur a fallu, pour couvrir les 760 km qui séparent leur camp de base au nord de l’île d’Ellesmere près du lac Hazen, l’île la plus septentrionale de l’archipel arctique canadien, jusqu’au pôle Nord. Contrairement à Peary qui a effectué le trajet en traineau à chiens, ils ont fait le trajet en avion (Deux DHavilland Canada 6 Twin Otter – un pour les explorateurs, l’autre avec des réserves de carburant.)

(De g. à d.) Peter Hillary, Sir Edmund Hillary, Mike Dunn et Neil Armstrong

Lorsqu’une bouteille de Champagne est débouchée, à peine a-t-on servi deux verres, que le breuvage dans la bouteille commence à geler, il faut dire que la température ambiante est de moins 40 degrés centigrades.

(De g. à d.) Neil Armstrong, Michael Dunn et Sir Edmund Hillary. On aperçoit à l’arrière plan l’un des deux DHC-6 Twin Otter.

Neil Armstrong affirmera : « J’ai trouvé ce voyage au pôle Nord extrêmement intéressant, principalement, car c’est tellement différent de ce que nous avons l’occasion de voir dans la vie de tous les jours. C’est tellement inhabituel là-haut. Cela valait vraiment les incidents que nous avons rencontrés lors du voyage. »

En effet lors du retour, après avoir atterri sur l’île d’Ellesmere, la météo devint exécrable, et ils durent rester confinés trois jours avant de pouvoir reprendre l’avion vers  le hameau inuit de Resolute sur l’île Cornwallis.

A l’issue de cette expédition, Neil Armstrong recevra une attestation des Territoires du Nord-Ouest, certifiant qu’ayant traversé le cercle arctique et atteint la latitude 90° N, il fait désormais parti du club très fermé de la Polar Bear Chapter of the Order of Arctic Adventurers. (Confrérie de l’Ours Polaire de l’Ordre des Aventuriers de l’Arctique)