Apollo 17 ou I Was Strolling on the Moon One Day

Les astronautes Eugene Cernan et Harrison Schmitt ont débuté la première des trois activités extravéhiculaires* sur la surface de la Lune de la mission Apollo 17, il y a quatre heures et trente-cinq minutes, et se trouvent alors à la Station 1, à quelque 150 mètres du cratère Steno, à une distance d’environ 1,6 km au sud du LM. Un site d’exploration géologique qu’ils ont rejoint en « jeep lunaire ».

Peu avant de retourner vers le LM le géologue Harrison Schmitt se met à chanter une adaptation circonstancielle du refrain de la chanson « The Fountain in the Park », composée par Robert King (1862-1932) en 1884, qui a utilisé le pseudonyme Ed Haley pour la signer. L’extrait en question a notamment été interprété par Judy Garland dans la comédie musicale « En avant la musique » (Strike Up the Band) sortie en 1940.

While strolling through the park one day
In the merry merry month of May
I was taken by surprise
By a pair of roguish eyes
In a moment my poor heart was stole away

C’est ainsi que le 12 décembre 1972, Harrison Schmitt et Eugene Cernan chantent tous les deux sur la Lune…

121:35:45 (Temps écoulé depuis le décollage, h:min:s) Harrison Schmitt commence : « I was strolling on the Moon one day… » (Je me baladais sur la Lune un jour…)

121:35:49 Eugene Cernan entonne :  (Les deux chantent en même temps) « …in the merry, merry month of… » (en ce joyeux, joyeux mois de…)

121:35:51 Cernan :  « …May » . Schmitt:  « …December ».

La mission Apollo 17 se déroulant au moins de décembre, Schmitt utilise très justement le mois en cours, alors que Cernan s’en tient à la chanson originale.

121:35:52 Cernan le reprend : « No, May. »

121:35:54 Schmitt rectifie : « May. »

121:35:55 Schmitt poursuit : « When much to my surprise, a pair of bonny eyes.. ». (Quand à ma grande surprise une paire de beaux yeux…) Schmitt ne se souvient plus des paroles…)  « …be-doop-doo-doo… »

Il s’interrompt pour ajouter : « Isn’t this a neat way to travel? » (N’est ce pas un moyen sympa de voyager ?) faisant également référence à leur façon de se déplacer sur la Lune ; par bonds, puis continue à chantonner : « …dum du dum du dum… »

A 121:36:05 Robert Parker [Astronaute du groupe 6 (1967)] qui fait office de capcom annonce : « Sorry about that, guys, but today may be December ». [Désolé de vous dire ça les gars, mais aujourd’hui (dans le contexte présent), Décembre serait plus approprié.]

Dans l’Apollo 17 Lunar Surface Journal de Eric M. Jones, la remarque de Robert Parker est retranscrite comme ci-dessus, mais ne s’agit-il pas plutôt d’un jeu de mot ? Et alors il eût fallu la retranscrire ainsi : « Sorry about that, guys, but today May be December » avec un M majuscule pour désigner le mois de Mai, et non l’auxiliaire modal !

La scène en image !

[30 mai 2018 – ERRATUM – Depuis le 24 janvier 2017, date de publication de la présente anecdote, c’est cette vidéo que j’utilisais pour l’illustrer, comme notamment, le site : Marshall Space Flight Center History Office à cette adresse: https://history.msfc.nasa.gov/saturn_apollo/videos.html – (cf le huitième clip)  , or je viens d’être contacté par M. Michel Ramseyer qui m’indique que les images en question concernent en réalité la mission Apollo 16… Effectivement, il s’agit bien de John Young et Charles Duke se dirigeant vers « House Rock », un rocher d’une douzaine de mètres de haut et de seize à vingt mètres de large (la taille d’une maison, quoi !) et non pas d’Eugene Cernan et Harrison Schmitt ! ]

Voici donc les bonne images !

Mes plus chaleureux remerciements à M. Ramseyer, et mes plus vives félicitations pour sa redoutable perspicacité.

*La première des trois activités/sorties extravéhiculaires, ou EVA (pour Extra Vehicular Activity) a commencé le 11 décembre à 23:54:49 (avec Eugene Cernan qui sort du LM le 12 décembre à 00:01:00) et se termine le 12 décembre à 7:06:42, heure UTC. (De 117:01:35 à 124:13:28 GET – Ground Elapsed Time i.e. le temps écoulé depuis le décollage.)

La deuxième EVA dure 7:36:56,  et la troisième 7:15:08. Il y a également une sortie dans l’espace de Ronald Evans lors du trajet retour d’une durée de 1 heure et 7 minutes.

La durée de l’activité extravéhiculaire est calculée à partir de la dépressurisation complète du module lunaire jusqu’à sa re pressurisation.

Trois membres de la Rocket Team décèdent la même semaine

En juillet 1998, trois membres de la Rocket Team de Wernher von Braun décèdent la même semaine, à quatre jours d’intervalle, de causes naturelles.

  • Max Ernst NOVAK (1909-1998) est décédé à Huntsville le mardi 7 juillet à l’âge de 89 ans.
  • Robert Heinrich Karl PAETZ (1909-1998) à Grant (48 km au sud-est de Huntsville) le jeudi 9 juillet à 89 ans.
  • Albert Eugen SCHULER (1915-1998) à Huntsville le vendredi 10 juillet à 83 ans.

Zond 5 crée la panique

En 2006, sur les ondes de la radio « The Voice of Russia » (Radio Spoutnik depuis le 10 novembre 2014) le cosmonaute Pavel Popovich (1930-2009) rapporte cette anecdote sur la mission Zond 5 :

« A la fin des années 60 nous nous préparions à effectuer une mission autour de la Lune. A ce moment-là nous envoyions les dénommées Zond, en réalité des répliques du vaisseaux Soyouz mais sans cosmonautes à bord.

Chacune de ces sondes devait passer derrière la Lune et revenir vers notre Terre. Le problème crucial rencontré par ces sondes était l’atterrissage. De toutes les sondes lancées, une seule réalisa un atterrissage nominal. Lorsque nous réalisâmes que nous n’irions jamais vers la Lune, nous décidâmes de monter un petit canular.

Nous demandâmes à nos ingénieurs de raccorder le récepteur radio de la sonde à un émetteur. Les vols lunaires étaient alors suivis par un centre de contrôle se trouvant à Eupatoria en Crimée. Alors que la sonde [ Zond 5, septembre 1969 ]* – s’apprêtait à contourner la Lune, je me trouvais au centre de contrôle, aussi ai-je pris le micro et annoncé : « Le vol se déroule comme prévu, nous approchons de la surface… »

Quelques secondes plus tard, mon appel – comme s’il avait été émis depuis l’espace – fut reçu sur Terre, y compris par les américains. Le conseiller américain pour l’espace, Frank Borman, reçu un appel du Président Nixon qui lui demanda : « Comment se fait-il que Popovich parle depuis la Lune ? ».

Ma blague a provoqué une véritable panique.  

Environ un mois plus tard Frank est venu en URSS et je fus chargé de l’accueillir à l’aéroport. Il était à peine sorti de l’avion qu’il brandit son poing et me dit : « Eh, espèce de délinquant spatial ! »

* Cette précision est apportée par Colin Burgess et Rex Hall dans leur ouvrage : « The First Soviet Cosmonaut Team » paru en 2009 (page 318) qui mentionne également cette anecdote.

L’anecdote rapportée par Pavel Popovich est croustillante, mais comporte quelques erreurs de chronologie…

Contrairement à ce qu’affirment les auteurs du livre sus-cité, Zond 5 n’a pas été lancée en septembre 1969 mais un an plus tôt, en septembre 1968 (la mission s’est déroulée du 15 au 21 septembre 1968).

Il se trouve qu’à cette date Richard Nixon n’est pas encore Président des Etats-Unis, il ne le deviendra que le 20 janvier 1969 (Il est élu le 5 novembre 1968) et Frank Borman n’est pas encore son conseiller spécial pour les affaires spatiales. Le premier est encore en campagne électorale, le second prépare Apollo 8 !

Popovich précise qu’environ un mois après cette « blague » il accueille Frank Borman en URSS… Pas tout à fait, puisque le tout premier voyage de Borman en Union Soviétique n’intervient qu’en juillet 1969, 9 mois après les « faits ».

Du 2 au 11 juillet 1969 Frank Borman, sa femme Susan, et leur deux fils Edwin et Frederick visitent l’Union Soviétique pour la toute première fois, sur invitation de l’ambassadeur Anatoly Dobrynin qu’il avait rencontré en janvier.

Borman est le tout premier astronaute à faire ce voyage. Un véritable événement qui donnera même lieu à une conférence de presse à son retour, le 12 juillet 1969, soit 4 jours avant le lancement d’Apollo 11 !

En réalité, c’est un radiotélescope de l’observatoire de Jodrell Bank en Angleterre, qui intercepte dans le nuit du 18 au 19 septembre 1968 une conversation entre les cosmonautes Pavel Popovich et Vitali Sevastianov (qui font partie des quatre équipages affectés au programme lunaire L1), supposément à bord de Zond 5, et le centre de contrôle des vols d’Eupatoria en Crimée**.

Très vite la NASA se rend compte que l’origine de la transmission est « terrestre » et qu’il s’agit vraissemblablement d’un test du système de communication !  

Bien que Zond 5 emporta végétaux et animaux, il n’y avait aucun spécimen du genre Homo sovieticus à bord !

Pavel Popovich et Frank Borman – Juillet 1969

**Le six juillet 1969 Frank Borman visite le centre de contrôle d’Eupatoria.