Une épitaphe pour le programme Apollo

Le célèbre sociologue de l’université de Columbia, le Dr Amitai W. Etzioni, (né Werner Flak à Cologne en 1929) très critique face aux coûts du programme lunaire américain, donne en décembre 1972 cette épitaphe du programme Apollo dans le New York Times :

«  Ce fut le dernier souffle d’une société adonnée à la technologie et préoccupée par les relations publiques, la dernière escapade orchestrée par une coalition militaro-industrielle à la recherche de conquêtes dans l’espace, tout en ignorant les besoins croissants sur Terre. »

Définition du mot escapade : « Action d’échapper un certains temps aux obligations de la vie quotidienne. » (Larousse)

Pas de touristes à bord de la navette spatiale

« La NASA ne prévoit pas d’emmener des touristes dans l’espace avec la navette spatiale » affirme le Washington Star dans son édition du 8 juillet 1980, en dépit des nombreuses demandes reçues.

A cette date, plus de 15 000 personnes ont déjà essayé de réserver un vol, et 1 200 demandes supplémentaires arrivent chaque semaine dans les bureaux de la NASA.

« Des non-astronautes pourront faire des vols dans la navette spatiale pour réaliser des expériences » affirme Chester M. Lee, le directeur du programme, « mais nous ne sommes pas prêts à faire voler des touristes.

Aucune disposition n’a été prise en ce sens, et il n’existe aucune perspective pour des passagers improductifs. »

Contre toute attente, ce sont les russes, en 2001, qui franchiront le pas, et permettront à l’américain Dennis Tito, de devenir le premier touriste spatial de l’histoire, pour la somme de 20 millions de dollars. (28 millions en dollars constants)

Que des sociétés privées proposent des voyages spatiaux touristiques, libre à elles… Mais que ce soit le fait d’agences gouvernementales, dans des infrastructures payées par le contribuable, est tout de même le signe d’une certaine décrépitude !

Cela dit, on estime le potentiel du marché du tourisme spatial à 32 milliards de dollars à l’horizon 2021…

De la fiabilité de la navette spatiale

La navette spatiale est l’un des appareils les plus complexes jamais conçus, elle est constituée de plus de 2 500 000 pièces, 365 km de câblage, 1 440 coupe-circuits…

Comme en témoignent les catastrophes de Challenger et de Columbia, le décollage et l’atterrissage constituent les phases les plus dangereuses d’un vol de navette spatiale, car il y a relativement peu de danger en orbite dans l’espace.

Malheureusement, cette complexité s’est révélée difficile à gérer, entraînant la perte de 2 navettes (et 14 astronautes) en 135 missions, soit un taux d’échec de 1,48 %.

Ce qui est beaucoup plus que les pertes subies par les compagnies aériennes, 0,00005 %, soit 1 crash tous les deux millions de vols.

Même exprimé en taux de mortalité par milliard de km parcourus, (le passager-kilomètre ou voyageur-kilomètre) ce qui donnerait théoriquement un avantage à la navette spatiale, puisque la distance moyenne parcourue par mission est d’environ 6,5 millions de km, on obtient tout de même le chiffre de 2,5 morts par milliard de km, toujours supérieur aux 0,5 décès des compagnies aériennes. Mais toujours plus faible que le taux affectant l’automobile, qui est de 7,5 décès par milliard de km parcourus.

Les 5 navettes spatiales ont couvert un total de 872,9 millions de km, soit pratiquement 6 fois la distance moyenne entre la Terre et le Soleil, ou 11 fois la distance moyenne entre la Terre et la planète Mars.

Ces kilomètres ont été parcourus en 21 152 orbites, et 1 333 jours, avec 852 membres d’équipage, ce qui représente 355 individus au total. 306 hommes et 49 femmes, dont certains ont effectué jusqu’à 7 vols.

Un astronaute avait 1 chance sur 61 de ne pas survivre à la mission.

Cela dit, si le nombre d’astronautes à bord de Challenger et de Columbia avait été, par exemple, de 4, au lieu de 7, le chiffre passe à 1 chance sur 106,5.

2 échecs sur 135 missions = 1 chance sur 67,5 de périr lors d’une mission.

Lorsque Challenger a explosé, il s’agissait de la 25e mission, les statistiques étaient alors de 1 chance sur 25, et après la désintégration de Columbia, le 113e vol du programme, on passe à 1 chance sur 56,5 !