Frank K. Ellis, un candidat astronaute hors du commun

Parmi les candidatures des astronautes du groupe 5, l’une est particulièrement remarquable, il s’agit de celle du capitaine de corvette (lieutenant-commander) Frank K. Ellis (1933-2016) de l’US Navy. Une candidature qui révèle une extraordinaire résilience…

Sur les 5 000 candidatures reçues par la NASA pour le recrutement de son cinquième groupe d’astronautes en 1966, seulement 351 répondaient aux critères de sélection ; au final 159 furent retenues. 44 candidats subiront l’ensemble des tests et ce sont finalement 19 astronautes qui composeront ce groupe 5.

Le 11 juillet 1962, à 29 ans, Frank K. Ellis est victime d’un effroyable accident aux commandes de son Grumman F-9 Cougar, alors qu’il se prépare à atterrir sur la base aéronavale de Point Mugu en Californie, la commande des gouvernes de profondeur ne répond plus, l’avion pique du nez, il va s’écraser… A 100 mètres d’altitude, il s’apprête à s’éjecter lorsqu’il aperçoit une zone résidentielle faisant partie de la base, et des personnes alentour, sur lesquelles son appareil va s’écraser, il manœuvre aussitôt pour les éviter, ce faisant il perd de précieuses secondes, l’avion continuant à perdre de l’altitude, Frank Ellis ne finit par s’éjecter qu’ à une hauteur d’environ 25 mètres, ce qui est beaucoup trop bas. Son parachute ne s’ouvre pas complètement, heureusement des eucalyptus viennent quelque peu amortir sa chute, ce qui lui sauve la vie, avant de tomber à demi-inconscient sur le sol.

Les secours arrivent très rapidement sur les lieux et constatent que sous la violence du choc sa jambe droite est entièrement sectionnée sous le genou, et que sa jambe gauche est cassée en trois endroits. Lorsque James Rubright de l’équipe de sauvetage saute de l’hélicoptère, il enlève aussitôt sa ceinture pour faire un garrot sur la jambe amputée, un geste qui lui sauve la vie.

Les médecins de l’hôpital St John ont peu d’espoir…

L’héroïque manœuvre pour éviter à son Cougar en perdition de s’écraser sur le lotissement a sauvé de nombreuses vies, mais l’a très gravement mutilé…

Contre toute attente, sa pugnacité et une excellente condition physique par ailleurs, lui permettent de survivre, hélas après trois semaines d’efforts acharnés pour sauver sa jambe gauche, les médecins doivent se résoudre à lui amputer celle-ci également…

Après l’amputation, les douleurs insoutenables, la fièvre, ont disparues et son état psychologique et physique sont en constante progression : « J’étais si reconnaissant d’être toujours en vie, j’aurais dû mourir dans ce crash ! »

En décembre il essaye ses nouvelles prothèses et n’a plus qu’un objectif : revoler avec la Navy. Passer le restant de sa vie à ne rien faire avec une pension d’invalidité, très peu pour lui… Il a perdu ses deux jambes, mais il veut retourner dans le ciel…

Il reçoit la Distinguished Flying Cross pour acte d’héroïsme après deux ans de convalescence.

Frank K. Ellis vient de recevoir sa Distinguished Flying Cross, à gauche son épouse Christine, à droite le vice-amiral Paul Stroop, commandant des forces aériennes navales de la flotte du Pacifique. 

Pour prouver qu’il peut revoler, il s’impose un entrainement sportif draconien, natation,  cyclisme, ski nautique, course d’obstacles etc… Et même un saut en parachute !

Frank K. Ellis se prépare pour une séance de ski-nautique.

A force de persévérance et de détermination les responsables de la Navy, pour le moins réticents, finirent par lui redonner une accréditation de vol temporaire, puis définitive, mais uniquement sur des appareils à double commandes et en présence d’un co-pilote qualifié.

Frank K. Ellis sortant de son McDonnell F3H Demon

Lorsque Frank Ellis entend à la radio que la NASA cherche des pilotes qualifiés ne mesurant pas plus d’1 m 82, il se dit qu’il est le seul pilote à pouvoir faire varier sa taille de 1 m 50 à 1 m 78… « Par ailleurs peut-être que la NASA utilisera une petite capsule, juste assez grande pour le plus petit pilote de la Navy… Je peux laisser mes jambes sur le pas de tir » ironisa-t-il lors d’une interview.

Lorsque la NASA retourna à la Navy les candidatures la concernant pour valider les présélections basées sur leur dossier militaire, le nom d’Ellis figurait sur la liste des 50 pilotes retenus. Après le passage par le chef des opérations navales, son nom n’apparaît plus… Lorsque l’amiral David MacDonald renverra la liste à la NASA accompagnée d’une lettre d’explication, il écrira que Frank Ellis n’est pas techniquement qualifié pour être astronaute, mais du point de vue de la motivation, de la formation, de l’entraînement, et de l’expérience, il était classé cinquième sur la liste.

Déçu et très en colère, il déclara que ne pas avoir de jambes ne diminuait en rien ses qualités de pilote, et que dans l’espace, en impesanteur, les jambes ne servent à rien !

Malgré toutes ses démarches Frank Ellis n’obtiendra jamais, non plus, sa certification solo…Il quitte la Navy le 31 octobre 1968 pour se consacrer à une carrière dans l’immobilier. Il est mort le 27 décembre 2016, laissant sa femme Christine, 4 enfants et 6 petits-enfants…

A ce jour aucun Homme handicapé n’est encore jamais allé dans l’espace !

Frank Ellis à bicyclette…

La famille Ellis circa 1964 : (De g. à d.) Debra Ann, David Alan, Daniel Andrew, Christine « Chris » son épouse, Dana Angela, et Frank. Tous les prénoms de ses enfants commencent par un D et le second par un A !

Frank K. Ellis a écrit un livre intitulé : « No Man Walks Alone ».

Etude comparative des programmes spatiaux soviétique et américain

Le Dr Charles S. Sheldon (1917-1981) était le chef de la division scientifique du service de recherche du Congrès, et une sommité sur le programme spatial soviétique.

Il est le premier à avoir compris que la dénomination Cosmos ne concernait pas un type de vaisseau spatial, ou un programme en particulier, mais est une appellation servant de couverture à d’innombrables types d’activités spatiales y compris les missions ratées.

L’une de ses études, Review of the Soviet Space Program with Comparative United States Data, (Etude du programme spatial soviétique avec des données comparatives des États-Unis), publié par le Congrès en 1967 retrace le développement du programme spatial soviétique avec une minutie et une acuité jamais atteinte dans un document rendu public.

Charles Sheldon a notamment participé à la rédaction du National Aeronautics and Space Act de 1958, qui a permis la création de la NASA et du Communications Satellite Act de 1962, qui a permis d’impliquer des sociétés privées pour la commercialisation des satellites de télécommunication.

Lors d’un discours au National Space Club à Washington D.C. en août 1970 il donne les informations suivantes :

« L’U.R.S.S. dépense 2% de son PNB pour l’espace et les Etats-Unis 0,5 %. En 1969 le PNB de l’Union soviétique est estimé à 420 milliards de dollars ; celui des Etats-Unis est de 931 milliards. Les lancements spatiaux soviétiques réussis furent au nombre de 44 en 1966, 74 en 1968, 70 en 1969, et jusqu’ici, 40 pour cette année. La part la plus importante de leur activité concerne la photo reconnaissance. Chaque année l’U.R.S.S. dépasse les Etats-Unis en ce qui concerne la masse totale des charges utiles envoyées dans l’espace, ce depuis les 83,5 kg du premier Spoutnik en 1957, sauf pour l’année 1969. La masse totale des charges utiles envoyées par l’U.R.S.S. s’élève à 2 millions de kg comparé à 1,9 millions de kg pour les Etats-Unis. »

En 1971, Charles Seldon affirme qu’environ 600 000 personnes travaillent pour le programme spatial soviétique. Entre 1957 et 1970, Vandenberg AFB est le site qui enregistre le plus grand nombre de lancements réussis, avec 311, vient ensuite Baïkonour avec 282, puis le Centre Spatial Kennedy avec 189, et Plesetsk avec 147.

Les missions militaires représentent environ les 2/3 des lancements pour les deux pays. Alors que les missions militaires sont en hausse en U.R.S.S., avec 28 missions en 1966 et 57 en 1970 elles sont en baisse aux Etats-Unis, avec 34 en 1966 et 16 en 1970.  

Bien que les deux nations soient en compétition, elles collaborent notamment pour la météorologie, la biologie spatiale, le géomagnétisme, et la mise au point de systèmes d’amarrages compatibles afin de faciliter l’assistance mutuelle en cas de problème, ou la conduite de projets communs.

David Bowie, un artiste très spatial

En 1969, l’année du premier atterrissage sur la Lune, un britannique de 22 ans, David Robert Jones dit David Bowie, chante une chanson intitulée « Space Oddity » (littéralement « Bizarrerie de l’espace ») directement inspirée par le film de Stanley Kubrick « 2001, A Space Odyssey ».

En dépit du thème de la chanson, un astronaute en perdition dans l’espace, le morceau est choisi par la BBC pour illustrer en direct, les images des premiers pas de l’Homme sur la Lune !  Ce qui amusera beaucoup David Bowie !

Dans son tout dernier clip, tiré de l’album « Blackstar », son album testament, sorti deux jours avant sa disparition, il met en scène un astronaute gisant mort sur le sol lunaire. Le « Major Tom » est mort, la boucle est bouclée…

Depuis la mission Gemini 6, la NASA utilise des chansons pour réveiller ses astronautes dans l’espace (Wakeup calls), ainsi lors des missions STS-78 (c’était en l’honneur du commandant de la mission Terence Thomas « Tom » Henricks) et STS-112, « Space Oddity » fut diffusé dans la navette spatiale.

Plus récemment, en 2013, le Canadien Chris Hadfield a tourné depuis la Station Spatiale Internationale le premier clip en impesanteur de l’Histoire, en reprenant « Space Oddity » à la guitare, modifiant quelque peu les paroles, pour les adapter à son cas personnel.

L’astronaute britannique Tim Peake en ce moment à bord de la Station Spatiale Internationale fut l’un des premiers à  « tweeter » un hommage au chanteur disparu depuis l’ISS : « Saddened to hear David Bowie has lost his battle with cancer – his music was an inspiration to many. »

« Sa musique a été une inspiration pour beaucoup de gens »…. Et le sera certainement encore très longtemps !

« SPACE ODDITY » (une traduction proposée par votre serviteur)

Centre de contrôle à Major Tom
Centre de contrôle à Major Tom
Prends tes cachets protéiniques et mets ton casque
Centre de contrôle à Major Tom (Dix, neuf, huit, sept, six…)
Début du compte à rebours, allumage des moteurs (cinq, quatre, trois…)
Attention à la mise à feu, et que l’amour de Dieu soit avec toi (… deux, un, décollage.)

Ici le centre de contrôle à Major Tom
Tu es vraiment à la hauteur
Et les journaux veulent tout savoir à ton sujet
Maintenant il est temps de quitter la capsule si tu l’oses
Ici Major Tom au centre de contrôle
Je franchis la porte du sas
Je flotte vraiment de la manière la plus bizarre
Et les étoiles semblent très différentes aujourd’hui

Car je suis là, assis dans ma boîte de conserve
Loin au-dessus du monde
La planète Terre est bleue
Et il n’y a rien que je puisse faire

Bien que je sois passé à plus de cent soixante mille kilomètres
Je suis serein
Et je pense que mon vaisseau sait où aller
Dis à ma femme que je l’aime énormément, elle le sait
Centre de contrôle à Major Tom
Tes circuits sont morts, il y a un problème
Vous m’entendez, Major Tom ?
Vous m’entendez, Major Tom ?
Vous m’entendez, Major Tom ?

Vous m’entendez et je flotte autour de ma boîte de conserve
Loin au-dessus de la lune
La planète Terre est bleue
Et il n’y a rien que je puisse faire.

David Bowie (1947-2016)