Le 10 mai 1972, Charles Conrad aux commandes de son T-38A Talon (69-7086) revient des locaux de ILC Industries, le fabricant des combinaisons spatiales de la NASA, situés à Dover dans le Delaware.
T-38
Il effectue une escale à la base aérienne Dobbins à Marietta en Georgie, puis reprend l’air à destination de la base aérienne Ellington située à 11 km du Centre des Vaisseaux Spatiaux Habités, près de Houston.
Alors qu’il commence son approche sur Ellington on lui indique que le plafond est trop bas, les conditions météorologiques sont défavorables, on lui transmet alors les vecteurs pour un atterrissage à l’aéroport William P. Hobby, à 11 km de Houston.
Alors qu’il entame son approche finale à quelque 250 mètres d’altitude sur la piste de Hobby dans l’obscurité et sous un violent orage et des éclairs, une panne électrique provoque l’extinction des lumières du cockpit et de certains instruments de navigation (ça a du lui rappeler des souvenirs !).
Aussitôt Charles Conrad annule son approche et essaye de remonter au-dessus des nuages, ce faisant le circuit électrique se rétablit, tout redevient normal.
En raison des problèmes rencontrés, il souhaite relier un aéroport permettant l’atterrissage en visuel, il est de ce fait dérouté vers la base aérienne Randolph de San Antonio. Lorsqu’il s’avère qu’il n’aura pas assez de carburant pour rallier Randolph, il est dirigé vers Bergstrom, une base aérienne située à une dizaine de kilomètres au sud-est de la capitale du Texas.
L’appareil tombe en panne d’essence alors qu’il arrive sur Bergstrom, il s’éjecte à 1 100 mètres, à environ 20:45 heure locale. Son T-38 de 756 000 dollars (1961) s’écrase à environ 3 km de la base sur une zone inhabitée. Charles Conrad est sain et sauf. Après un examen médical il est autorisé à rentrer chez lui, le soir même.
La commision d’enquête, dirigée par l’astronaute Stuart Roosa, a déterminé qu’un circuit imprimé insuffisamment protégé contre l’humidité, a provoqué la panne du générateur d’électricité gauche. Ce circuit imprimé fait partie d’un régulateur de tension et d’un circuit de protection, qui permet de passer sur le flux électrique du générateur opposé, lorsque l’un des deux tombe en panne.
Décidément Charles Conrad n’a pas eu beaucoup de chance avec les orages et les éclairs, heureusement, dans les deux cas, tout s’est bien terminé ! La première fois c’était lors du décollage d’Apollo XII !
Wernher von Braun en 1938 avec un pin’s en émail du NSDAP
Dans l’autobiographie, dite de science-fiction, d’Arthur C. Clarke (1917-2008) intitulée Astounding Days parue en 1989, le chapitre 29 est consacré à son ami Wernher von Braun. (Il a également écrit Ascent to Orbit, sorti en 1984, qui est son autobiographie scientifique.)
Arthur C. Clarke contacte Wernher von Braun par courrier en 1951, ils se rencontrent la première fois à New-York en 1953 et la dernière fois fin 1976 au domicile de von Braun dans la banlieue de Washington…
Clarke initie Wernher von Braun à la plongée sous-marine et ce dernier écrira même la préface de son livre intitulé The Challenge of the Sea (Le défi de la mer) publié en juillet 1969… Ils furent des amis proches.
Arthur C. Clarke raconte qu’un jour Wernher von Braun lui a fait cette confession : « Non, je n’ai jamais su ce qu’il se passait dans les camps de concentration, mais je le subodorais, et dans ma position j’aurais pu me renseigner et savoir. Je ne l’ai pas fait, et pour ça, je me méprise. » (« No, I never knew what was happening in the concentration camps. But I suspected it, and in my position I could have found out. I didn’t, and I despise myself for it. »)
Comment Wernher von Braun pouvait-il ignorer ce qui se passait dans les camps de concentration ? Alors que ces derniers étaient parfaitement connus par l’ensemble des allemands, puisque les premières victimes furent des allemands eux-mêmes, les opposants au régime.
Le 20 mars 1933, Himmler annonce lors d’une conférence de presse à Munich, l’ouverture d’un camp de concentration, qui ouvre ses portes deux jours plus tard dans une ancienne usine de poudre, à la périphérie de la petite ville de Dachau, à une vingtaine de kilomètres de Munich, il peut accueillir 5 000 détenus.
Il s’agit du premier camp de concentration nazi. Dans un premier temps Dachau, ayant le statut de camp d’Etat, fut surveillé par la police régionale bavaroise ; mais le 11 avril c’est la SS qui en prend le commandement.
C’est le début d’un système de terreur, de la stratégie concentrationnaire à vocation dissuasive, sur laquelle tout régime totalitaire s’appuie, pour museler l’opposition…Il faut donc qu’elle soit bien connue pour inspirer la terreur ! « Tiens toi tranquille ou tu finiras à Dachau » est une formule qui ne tarda pas à entrer dans le langage courant. L’existence des camps fit l’objet d’articles détaillés dans les médias.
Et puis, nous savons avec certitude que Wernher von Braun connaissait l’existence du camp de concentration de Dora, à proximité duquel les missiles V2 étaient fabriqués en série, puisqu’il a rencontré dans l’usine souterraine de Mittelwerk, l’éminent physicien français Charles Sadron qui y était interné, lequel a rapporté cette entrevue dès 1947 dans : « De l’Université aux Camps de Concentration : Témoignages Strasbourgeois. » réédité quatre fois depuis !
Et puis bien évidemment, il connaissait le Karlshagen Außenlager II, ce camp de travail dépendant administrativement du camp de concentration de Ravensbrück, qui a existé à Peenemünde du 17 juin au 13 octobre 1943, dont les quelques 600 détenus étaient logés au niveau inférieur de l’ultra-moderne hall d’assemblage F1. Détenus qui furent transférés au KZ-Außenlager ou Arbeitslager Dora le 13 octobre 1943, deux mois après le premier bombardement du centre de recherche.
Il ne pouvait pas ignorer non plus, que l’usine de Rax-Werk près de Wiener Neustadt qui a produit des V2 de mars à octobre 1943, était un Außenlager du camp de concentration de Mauthausen-Gusen , ou que les usines Zeppelin de Friedrichshafen qui ont fabriqué des composants de la V2 de 1941 à 1943, notamment des portions de fuselage et les réservoirs d’ergols, utilisaient des détenus de Dachau.
Il faut savoir qu’en 1934, devant la vindicte populaire, les camps de concentration ont failli fermer, ce qui prouve bien qu’ils étaient bien connus par la population allemande et qu’on savait ce qu’il s’y passait. Mais Hitler a consolidé son pouvoir, s’est rendu maître de l’Europe continentale. Dès lors le nombre de camps n’a cessé d’augmenter, et pour certains, leur rôle a évolué.
Cela dit, n’y a-t-il pas là une méprise entre camp de concentration et camp d’extermination ?
La confusion a-t-elle été faite par Clarke des années plus tard, ou directement par von Braun ?
Même s’il est vrai que la différence entre les deux est ténue, dans la mesure où certains camps de concentration sont devenus des camps d’extermination, comme Dachau, et Auschwitz créé en 1940, au départ pour être une zone d’intérêt économique, qui est devenu à partir de 1942 un camp d’extermination avec l’adjonction en octobre 1941 d’un camp dédié à cet effet, dépendant administrativement d’Auschwitz : Birkenau, situé à 3 km du camp originel…
Auschwitz et ses trois camps, d’une superficie de plus de 200 hectares, est devenu le symbole de l’Holocauste… Plus d’un million de personnes y furent assassinés à partir de 1942. (960 000 Juifs, 21 000 Roms, 75 000 polonais non-juifs, 15 000 prisonniers de guerre soviétiques…)
Bien évidemment, les camps de concentration ont été le théâtre de tortures, d’exactions sans nom, d’innombrables assassinats, mais l’extermination de masse ne commence à se mettre en place qu’en 1941, tout d’abord avec des dizaines de milliers de prisonniers russes, et notamment les commissaires politiques soviétiques.
La genèse de l’Holocauste fut longue et complexe et le résultat d’un processus meurtrier compliqué qui est le fruit d’initiatives venant aussi bien du haut commandement que de la base, il ne s’agit aucunement d’une décision prise à un moment donné par le régime nazi.
Rappelons également, que le camp de concentration n’a pas été inventé par les allemands, il ne s’agit pas d’une spécificité nazie, contrairement au camp d’extermination.
Aussi, lorsque Wernher von Braun parle de camp de concentration, il pense en réalité au camp d’extermination.
Il a existé une quarantaine de camps de concentration, plus un millier de camps satellites, dont certains dans des trains, ou même des églises abandonnées. Dans la pratique il s’agissait principalement de camps de travail qui s’implantaient ça et là et dont la durée de vie pouvait être très éphémère, ils ouvraient et fermaient selon les contingences du moment.
L’existence des camps d’extermination, ces centres industriels de mise à mort de masse était confidentielle. Il en existait six, auxquels il faut ajouter ceux de l’Aktion T4, réservés aux handicapés physiques et malades mentaux.
L’assassinat des handicapés, homosexuels, asociaux, vagabonds, tziganes, slaves, juifs, tous ceux que les délires eugénistes des responsables du Troisième Reich appelaient untermenschen (sous-hommes) était top-secret. Tous les ordres les plus compromettants furent donnés oralement. Alors bien évidemment, compte tenu de l‘ampleur de ce processus d’anéantissement qui impliquait pas mal de monde, il y a eu des fuites, des soldats en permission ont raconté des choses, mais il n’a jamais été possible à la population allemande de recouper tous les témoignages, de mesurer l’ampleur du génocide, puisqu’il était impossible à un allemand de s’exprimer ouvertement hors de la sphère privée !
Wernher von Braun comme beaucoup d’allemands, continueront à fréquenter des restaurants tenus par des juifs, comme le Zigeunerkeller à Berlin, continueront de faire leurs courses dans les magasins tenus par des juifs…
Il faudra attendre le premier septembre 1941 et la promulgation de nouvelles lois anti-juives notamment celle les obligeant à porter une pièce de tissu jaune en forme d’étoile de David, cousue sur leur vêtements, et celle interdisant tout contact avec les juifs, désormais clairement identifiables, qui devenait passible d’un internement en camp, pour que la population allemande se tienne à l’écart. Promulgation de lois, qui prouve de la manière la plus éclatante, que la propagande anti-juive du régime n’a pas eu l’effet escompté, et ne s’adressait pas à une population globalement antisémite. Sept siècles plus tôt, en 1269, Louis IX, le futur Saint-Louis, avait stigmatisé les juifs du royaume de France en leur imposant le port de la rouelle, une pièce d’étoffe de couleur jaune en forme d’anneau… Dès 1215, le quatrième concile œcuménique de l’Eglise catholique recommandait déjà aux souverains chrétiens de contraindre leurs sujets juifs au port d’une étoffe de couleur jaune ou rouge en forme de disque, cousue sur leur vêtements à hauteur de poitrine.
Un allemand moyen de cette époque, n’était pas plus antisémite qu’un français moyen !
Wernher von Braun aurait-il dû fuir l’Allemagne comme certains l’ont prétendu ? Plus facile à dire qu’à faire, compte tenu de sa position et des informations qu’il détenait, ses parents, sa famille, ses amis, ses collaborateurs, auraient certainement fait l’objet de représailles.
Le problème dans le jugement que nous faisons des contemporains allemands d’Hitler c’est que contrairement à eux nous connaissons la fin du film, et l’ampleur des crimes commis par les nazis (très abondamment commenté depuis la fin de la guerre), nous avons une vision globale, ce que Wernher von Braun et ses compatriotes, vivant sous une dictature, avec tout ce que cela implique, ne pouvaient en aucun cas avoir.
Pendant les dernières années de la guerre, ils avaient certainement des sujets de préoccupation plus égoïstes, liés à leur propre survie et celle de leur famille.
La véhémence de certains donneurs de leçons est toujours suspecte.
Il ne se passe pas une semaine en France sans que l’on ne nous propose sur les chaines de télévision des documentaires sur l’Allemagne nazie… C’est de très loin la période historique la plus étudiée, pourtant les poncifs et raccourcis ont la vie dure, surtout à l’école et à la télévision… Seuls les livres écrit par des historiens professionnels, spécialistes de l’Allemagne et de cette période, peuvent nous donner un éclairage pertinent sur tel ou tel aspect de l’Allemagne nazie, et permettent d’appréhender toute la complexité des situations…
Il est peu probable que Wernher von Braun ait ignoré le sort réservé aux personnes déportées vers l’Est, il avoue l’avoir soupçonné, mais il est certain qu’il ne pouvait en aucune manière en appréhender l’effroyable ampleur, ni d’ailleurs changer le cours des événements, qui dépassent l’entendement.
Devant l’indicible, nombre d’allemands se sont réfugiés dans le refoulement.
[De tous les livres sur les camps de concentration que j’ai pu lire, le meilleur est pour moi celui de Nikolaus Wachsmann, intitulé : « KL : A History of the nazi concentration camps ». Une œuvre majeure, en instance de traduction par Jean-François Sené, dont la sortie en librairie est prévue pour octobre-novembre 2017 : « KL: Une histoire des camps de concentration nazis » chez Gallimard. A ne surtout pas manquer !]
Dix jours de fortes intempéries ayant frappé le nord-est des Etats-Unis, les services météo ont été submergés d’appels de personnes qui en imputaient la responsabilité à Apollo 11.
Apollo 11
En effet les très fortes précipitations, ayant même provoqué des inondations dans certaines régions du New-Jersey, ont commencé le 19 juillet, lorsque le vaisseau spatial Apollo, dans l’ombre de la Lune, s’est inséré en orbite lunaire.
Ce fut un des mois de juillet les plus humides jamais enregistrés, avec 20 cm d’eau par mètre carré sur la seule ville de New-York, le record précédent datait de 1889 avec 30 cm ! Une pluviométrie 5 fois supérieure à la moyenne !
De trop nombreuses personnes étaient intimement persuadées que les pluies diluviennes étaient le résultat de l’interférence des astronautes de la mission Apollo 11 avec la Lune.
Le Dr. Robert Harris, météorologue de son état, résuma ainsi la situation : « Nous avons eu un déluge d’appels de toutes sortes de gens qui sont absolument convaincus, se fondant sur leurs études des saintes écritures, que le seigneur nous a enlevé le soleil. »
Heureusement, pour le personnel de l’antenne du bureau des services météorologiques américain à Manhattan, (U.S. Weather Bureau depuis 1870, puis National Weather Service à partir de 1970), les gens appelaient surtout les stations radio sur lesquelles elles écoutaient les prévisions !