Pourquoi le nom d’Aurora 7 ?

Le quatrième vol habité du programme Mercury, Mercury Atlas -7, devait être effectué par Donald Slayton qui avait baptisé sa capsule Delta 7, mais une arythmie cardiaque intermittente, l’a cloué au sol jusqu’en janvier 1973.

C’est Scott Carpenter qui est désigné pour le remplacer, il doit donc trouver un indicatif pour sa mission.

Il envisage tout d’abord Rampart 7, en l’honneur d’un massif montagneux de son Colorado natal, mais porte finalement son choix sur un nom ayant une connotation céleste, ce sera Aurora, d’après le phénomène lumineux appelé aurore boréale, en latin aurora borealis.

Il précise que lui aussi, lors de la rentrée atmosphérique, produira une traînée lumineuse. Il trouve par ailleurs que ce nom sonne bien, même si Rampart serait mieux passé au niveau des communications.

Scott Carpenter avait été le témoin privilégié de nombreuses aurores boréales lorsqu’il était affecté à la base aérienne d’ Adak en Alaska, à proximité du cercle polaire, où il avait effectué  des vols de reconnaissance vers l’URSS et la Chine.

Et puis, dans la mythologie, Aurora est la déesse de l’Aurore, soeur de Sol (le Soleil) et de Luna (la Lune). Mythologie dont on s’était déjà pas mal inspiré ; Mercure, Atlas… Carpenter voulait également souligner l’analogie avec le début de l’ère spatiale, l’aurore, étant le moment précis où le bord supérieur du soleil apparaît au-dessus de l’horizon.

Concernant le 7 : au départ Alan Shepard avait choisi comme indicatif Freedom puis avait ajouté 7, car sa capsule était la septième produite par les usines McDonnell. Grissom et Glenn pensant que c’était en l’honneur des sept premiers astronautes, avaient également ajouté un 7 au nom qu’ils avaient choisis, Carpenter fit pareil, Schirra et Cooper feront de même !

Mais pour Scott Carpenter le nom d’Aurora 7 prend une signification bien plus personnelle, en effet, lorsqu’il était enfant, il a vécu dans une grande maison située à l’angle de l’Avenue Aurora et de la Septième Rue.

Même s’il se défend d’avoir pensé à cela, les habitants de Boulder, Colorado, en sont convaincus !

Anecdote dans l’anecdote : un autre point commun entre la déesse Aurore (ou Eos dans la mythologie grecque), et Scott Carpenter (et le chiffre sept) est qu’ils ont eu de multiples amours et une nombreuse descendance. Carpenter a été marié quatre fois, divorcé trois fois, et a eu… 7 enfants, quatre avec sa première femme Renée, deux avec sa seconde femme Maria, et un enfant avec sa troisième épouse, Barbara !

Youri Gagarine tâcle le vol de Scott Carpenter

Youri Gagarine au Japon 1962

Lors du vol spatial de Scott Carpenter, le 24 mai 1962, Youri Gagarine se trouve  à Osaka au Japon dans le cadre d’une tournée mondiale, ce que les anglophones appellent « Goodwill Tour ».

S’adressant à une foule de plus de 5 000 personnes, Youri Gagarine souhaite bonne chance à Carpenter,  et déclare que « le rêve de l’Union Soviétique est de voir un jour des cosmonautes de différents pays dans le même vaisseau spatial ».

Après le retour de Carpenter sur Terre, certainement remis au pas, Youri Gagarine devient plus acerbe, et lors d’une interview avec des journalistes japonais il affirme : « Le vol de Carpenter ne peut pas être qualifié de succès total, car il largement manqué le point de retour prévu. (Carpenter a amerrit a 400 km de la zone prévue).

Ce qui ne fut pas le cas pour moi, ni pour Gherman Titov, nous avons atterrit exactement au point prévu ».

Bizarrement, il ajoute ensuite : « Nous ne savons pas encore si le vol de Carpenter est un fait établi, mais si c’est le cas, il n’apporte aucun progrès par rapport au trois orbites de John Glenn. »

Quelques décennies plus tard on apprendra notamment que :

-Gagarine a faillit mourir lors de la rentrée dans l’atmosphère, quand le module de service ne s’est pas correctement séparé du module de descente, et que l’ensemble, resté lié par une sangle, s’est mis à tournoyer violemment. Heureusement le filin a fini par se consumer et libérer le module de descente de forme sphérique, recouvert entièrement par un bouclier ablatif de 840 kg, ce qui l’a sauvé ! La conception du module de descente est d’une simplicité désarmante, de forme sphérique, l’orientation correcte du Vostok durant la descente est uniquement assurée par la répartition des masses (centre de gravité placé à « l’arrière » du centre géométrique –  « sous » le siège du cosmonaute) permettant une rentrée purement balistique, ou le passager subit une accélération maximale de 8 à 10 g.

-Gagarine s’est éjecté en parachute à 7 000 mètres parce que le module de rentrée qui pesait quand même 2 460 kg, le double d’une capsule Mercury, (L’ensemble Vostok à une masse de 4 730 kg alors que Mercury seulement 1 400 kg  – pour le vol de Cooper !) n’a pas été conçu pour pouvoir atterrir avec un cosmonaute à bord !

-Qu’il a atterrit à quelque 1 000 km de la zone prévue !

Un cadeau pour Leo DeOrsay

Avant de quitter le porte-avions USS Lake Champlain, Alan Shepard souhaite examiner son vaisseau spatial.

Le responsable NASA de l’équipe de récupération, Charles Tynan, vient juste de noter la position de tous les interrupteurs du tableau de bord, et les mesures affichées par les divers indicateurs et autres jauges.

Il se tient à côté du vaisseau spatial et s’apprête à partir lorsqu’ Alan Shepard arrive. Normalement la NASA avait donné comme instruction au personnel de ne pas parler à Shepard afin que son esprit ne soit pas « pollué » par des informations autres, que celles en rapport avec son vol.

Contre toute attente Shepard entame la conversation…  Les journalistes qui assistent de loin à la scène rapporteront dans leurs comptes rendus qu’il s’agissait d’une longue discussion technique… En réalité il n’en est rien… Après avoir confié à Tynan que ce vol bien trop court était fantastique, qu’il est ravi d’avoir amerri à portée visuelle du porte-avions, et combien il se sentit soulagé lorsque le parachute principal s’est déployé, il lui demande un service : démonter l’horloge de bord de Freedom 7 et la lui remettre de retour au Cap.

Tynan étant extrêmement réticent à récupérer quoi que ce soit sur le premier vaisseau spatial américain, Shepard a dû le persuader un long moment avant qu’il ne finisse par consentir.

Comme cette montre « huit jours » n’a aucune valeur scientifique ou technique dans le cadre de la mission, Tynan accepte de dévisser quelques boulons, et met l’objet dans son attaché-case.

Quelques jours plus tard Tynan remettra l’horloge à Shepard dans le Hangar S.

Les sept astronautes avaient eu l’idée de faire monter l’horloge sur un support en bois de noyer, pour l’offrir à leur avocat, Leo DeOrsay, qui défendait gratuitement leurs intérêts !